Tagged Robin Marais

Avarie en mer celtique…

La saison Class40 2016 se termine donc pour moi sur un abandon à la Normandy Channel Race. Je vous avoue qu’après deux belles transats en course je n’étais pas forcément bien préparer à cette éventualité, mais il paraît qu’il en est ainsi, que c’est la loi d’un sport qui reste mécanique, par définition quelque fois ça casse! Mis à part le mail que nous avons envoyer à la direction de course, je n’ai pas eu l’occasion de revenir sur les circonstances précises de notre avarie…

Il est environ 22 heures lorsque Cédric m’interpelle en me montrant le palier de safran tribord (au vent), nous naviguons maintenant tribord amure au près dans 24 nœuds de vent moyen (force 6), sous grand-voile 2 ris et trinquette, le bateau se comporte bien, nous sommes encore assez rapide. Je constate que trois vis sur six sont sorties d’environ 30 à 40 mm et ont “déclipsé” la pièce en plastique qui étanchéifie l’ensemble. Je comprends tout de suite que quelque chose cloche sérieusement, en vérifiant que le safran n’est pas descendu je m’aperçois que le palier bouge sérieusement.

Je descend alors voir par en dessous en me faufilant dans le tunnel qui sert aussi d’issue de secours, je constate alors relativement effaré que les vis ne traversent pas le pont, elles sont simplement vissées dans la mousse PVC du pont, ne voulant pas y croire je pense un court moment qu’elles sont vissées dans la pièce d’aluminium qui ferme le palier par en dessous et qui doit être taraudée à cet effet mais non les diamètres ne collent pas!

Je réussit à percer trois trous correctement car oui j’ai une perceuse à bord! Malheureusement je n’ai que deux vis assez longue, je cherche désespérément ce que je pourrais démonter pour en avoir d’autres et après plusieurs essais infructueux (banette, bloqueur…) je finis par accepter que nous n’avons pas d’autres vis de 6 suffisamment longue. Les deux que nous réussissons à serrer correctement sécurisent en partie le bateau puisque tant qu’elles ne cassent pas le palier ne peut plus sortir de son logement, mais il bouge toujours autant, retenu par le composite  qui commence à montrer des signes de faiblesse, je vois clairement la mèche de safran osciller dangereusement d’un coté, de l’autre, blang, blang….blang blang…

Après un rapide coup de fil à Olivier, l’architecte du bateau, nous comprenons qu’il n’ai pas raisonnable de continuer à naviguer ainsi au vu des prévisions sur les 24 prochaines heures…la mort dans l’âme nous abattons quasi plein vent arrière… Avec maintenant un peu de recul, je suis convaincu que nous avons pris la bonne décision, bien sûr on ne saura jamais vraiment si cela aurait empirer et jusqu’où, mais le risque c’est tout de même d’endommager le palier du bas et le tube de jaumière qui traverse la coque, dans ce cas c’est la voie d’eau assurée. Au vue des trois heures qui se sont écoulées entre la découverte du problème et la prise de décision, au vue du vent et de la mer que les bateaux proches de nous ont affronté pour monter à Tuskar rock, au vue des bords de reaching endiablés qui nous attendaient sur la suite du parcours, non il n’y a aucun doute, nous avons pris une sage décision.

Deux heure du matin, nous naviguons au portant toujours tribord amure, nous avons jusqu’à 38 nœuds de vent. Au matin alors que ça mollit un peu et que la mer s’assagit le palier ne bouge quasiment plus, les deux vis jouent enfin leurs rôles, nous pouvons ramener le bateau en sécurité à La Rochelle puisque nous rencontrerons essentiellement des vents faibles sur le trajet, la prévision commence a être plus claire, la dépression orageuse qui s’est creusée sur le golfe de Gascogne va maintenant se combler rapidement.

Vendredi matin, quelques heures avant d’arriver sur La Rochelle, nous naviguons sous grand spi dans 15 à 18 nœuds de vent, ça monte gentiment, le sud d’un front froid va passer dans quelques heures et le beau temps revenir avec le ciel de traîne puis la dorsale, les dauphins nous accompagnent volontiers, ils jouent sous le bateau, s’en vont un moment puis reviennent, bientôt ce sera la terre ferme et la fin d’une saison durant laquelle j’aurai parcouru environ 10 000 miles sur l’Océan Atlantique.

Techniquement parlant je n’aurai sans doute rien vu même si nous avions disposer de plus de temps avant la course, je suis très étonné que cela est tenu jusqu’à maintenant, il s’agissait pour moi d’un dossier classé sur lequel on ne revient que lorsqu’il y a un problème. Je regrette finalement de ne pas avoir effectué ce montage moi même, c’est dommage d’abandonner sur ce type d’avarie, ce n’est pas comme si une pièce avait cassé. Notre début de course nous a montré par bien d’autres aspects que nous manquions cruellement de temps de préparation. En effet j’ai repris le projet au début du mois d’ aout après quelques jours de repos suite à la Transat – Québec Saint-Malo, le bateau était démâté et encore hiverné. Je l’ai préparé en grande partie seul pour être au départ à Caen et suis donc arrivé au départ trop fatigué, c’est alors plus difficile de rentrer correctement dans la course, d’être à 100% à l’écoute du bateau et des éléments dès le début. D’un autre coté je n’ai que très peu d’expérience en double et j’ai pu voir que ce n’est pas un exercice évident, comme tout, cela demande un peu de préparation.

A l’heure ou j’écris ces lignes la pilule est passée mais je me souviendrai de cette nuit là pour bien longtemps, une décision difficile à prendre et un instant vraiment dur à passer lorsqu’il faut effectuer le changement de cap qui matérialise la décision. Je regarde maintenant vers l’avant, il n’est pas question de rester sur cet échec et j’espère pouvoir avoir à nouveau une chance au mois de mai pour l’édition 2017 de la Normandy channel Race, et puis un peu plus loin derrière l’horizon il y a la route du rhum 2018 qui me fait terriblement rêver, je vais travailler dur dès cet hiver sur ce projet, il s’agit maintenant d’enfourcher le bon cheval!

retour-lrEncore BRAVO aux trois premiers Pablo et Fidel, Phil et Sam, Maxime et Hugo, à tous les autres coureurs de cette Normandy Channel Race 2016 et bien sûr aux organisateurs qui ont effectué un travail remarquable. Enfin un immense MERCI aux équipes de Cabinet Z et Grizzly Barber Shop et plus généralement à tous ceux qui m’ont suivi ou aidé pendant cette saison 2016 bien remplie!

Mini-Fastnet, un tracé historique…

10496982_669520369793956_2354898814315523179_o.jpg

Nathalie et Robin ont réalisé une belle performance en arrivant à la 10ème place seulement 4h derrière les premiers prototypes vendredi matin.  La remontée vers le phare du Fasnet s’est faite dans un scénario météo compliqué avec des vents variables à faibles, ils sont restés dans le match jusqu’au bout alors que ce n’est pas forcément les conditions favorites de Marcel. La descente vers Douarnenez s’est effectué rapidement: ” En effet après une quarantaine de milles parcourus de nouveau dans la pétole après le phare le vent de sud-ouest s’est installé progressivement pour atteindre 17 à 20 nds en Manche, nous sommes donc rentrés essentiellement sous gennaker souvent au dessus de 12nds, c’était un bord magique, le bateau volait.”

Le résultat final paraît un peu decevant mais il faut replacer les choses dans leurs contexte. Il s’agissait de la première course de Robin depuis la Transat et si nous faisons, par extraction, un classement des prototypes construits avant 2007 Marcel arrive en tête!

Encore un grand Merci à tout ceux qui m’ont permis de courir ce Mini-Fasnet et à très bientôt pour de nouvelles aventures…

La Transat à bord de Marcel Forever Partie II

Le lendemain, 14/11 le vent reste fort toute la journée et la mer reste grosse et croisée, limite dangereuse… Au couché du soleil j’ai l’impression que cela commence à s’améliorer… la nuit sera en effet moins dure que la précédente, les rafales sont moins fréquentes et moins fortes…

Au petit matin, le 15/11, au large du cap Saint Vincent, la mer commence à s’organiser, c’est un peu moins le chantier… je décide d’envoyer à nouveau le code5 arisé à la place du gennak …Au final on va plus vite et c’est plus confortable…mais vers 12h une vague attrape l’étrave de Marcel en fin de surf, c’est le premier gros départ à l’abatée de la transat… A première vue plus de peur que de mal mais vers 16h je m’aperçois que la pile à combustible ne fonctionne plus… vue les dures conditions de mer et ma confiance aveugle dans cette pile je n’ai pas sorti mes panneaux solaires de la journée… mes batteries ne sont pas au top, quelque chose comme 25% pour la 1ère et 40 pour la seconde… Dans un premier temps je décide de sortir mes deux panneaux pour exploiter les derniers rayons de la journée qui filtrent à travers de gros nuages, c’est toujours ça de pris! Mon experience avec la pile me dit déjà que ca ne sent pas bon…

Le lendemain 16/11, la mer commençe à bien s’assagir et le vent à se stabiliser vers les 25nds, j’ai passé la nuit à beaucoup barré pour économiser l’énergie, je peux remettre le bateau sous pilote dès que le soleil me fournit suffisament d’énergie mais ce n’ai jamais suffisant pour assurer une bonne recharge…petit à petit mes “piles” tombent en desous de 12V…

La lecture du manuel ne donne rien de productif, après avoir checké à plusieurs reprises les différentes pannes possibles, je me résouds…il faudra sans doute s’arréter à Lanzarote pour trouver un moyen de recharger correctement…je me donne un temps pour voir encore si avec plus de soleil? je prendrai la décision en approche des îles, suivant le niveau de mes batteries…

Le 17 et le 18, je barre beaucoup et retrouve la confiance pour faire avancer Marcel à fond, je commence enfin à connaître mes spis correctement! La descente vers Lanzarote est un vrai plaisir, je fonce sous spi medium, même si le niveau batterie ne remonte pas, je suis content d’être enfin dans l’alizée! A ce moment je me dis que ça devrait être un peu comme ça jusqu’en Gwada.

18 vers 20h, je suis arrivé sur mon waypoint devant le port de Arrécif, mes batteries sont vers 11V je n’ai plus de pilote et bientôt plus de VHF. Je rentre dans le port sous GV 2 ris seule, c’est sur ça ne va pas très vite pour louvoyer dans ce vent de terre instable mais cela me laisse le temps d’identifier chaque cardinale avec certitude, il ne s’agit pas de faire une conn…! A 21h45 je suis à quai.

Le 21/11 à 1h30TU je reprend enfin la mer, cette fois ca y est, finit le “semi-cotier”, je pars traverser l’Atlantique avec Marcel. Il reste environ 10nds de vent synoptique mais sous le vent de l’Archipel, le flux est très pertubé… Je décide donc de piquer vers le sud pour me dégager, je sais que ça risque d’être mou au nord à cause d’une dépression orageuse quasi-stationnaire situer dans le nord-ouest des Canaries et à ce moment là j’ai confiance dans l’alizée…tout les éléments m’incitent à descendre sur leur route…

Après trois jours sous spi de tête et GV haute je tombe dans la pétole, je m’englue, le temps passe, c’est de pire en pire… les premiers jours je n’ai pas réussi à faire fonctionner ma BLU. C’est donc  à la vacation météo du 26/11 que je commence à comprendre… Alizée bien établie à l’ouest du 52° est une des phrase qui me restera sans doute à vie en tête…

Je comprends alors qu’il s’agit d’une vraie rupture d’alizée, il faut donc remonter vers le nord pour passer la dépression orageuse, passer le front puis le vent reviendra progressivement à l’est…

Après 48h de pétole bien gluante Le vent repart doucement par le sud ouest puis s’établi rapidement au sud pour une dizaine de noeuds en moyenne.Après une nuit sous gennak à 3/4nds pour seulement 1,5/3nds de vent, au petit matin nous avançons bien, sous spi de tête sur la route mais je sais que le vent devrai rapidement forcir tout en refusant, le temps reste orageux…

Dans l’après midi je suis déjà à fond sous gennak, en fin de journée il y a déjà 24/25nds, le vent continue de refuser et la pression descend…je ne tiend plus le gennak et décide d’affaler.

Je déboule encore à 13 ou 14nds, la visibilité n’est pas très bonne… mais avec la tombée de la nuit j’aperçois deux petites lueurs sur l’horizon. Nous sommes à environ 400milles dans le NO du cap vert j’imagine presque tout de suite que ce sont des Minis. Les deux lueurs se font rapidement de plus en plus nette...A tous les minis, A tous les minis, A tous les minis, du 491 Marcel For Ever, du 4, 9, 1 Marcel For Ever, est-ce que quelqu’un me recoit? Deux fois, toujours rien… après 5 minutes j’entend que quelqu’un essaie de me parler sans pouvoir comprendre, encore quelques minutes plus tard, les lueurs sont devenues bien nettes, j’entend Axel(229) nettement dans la VHF.

Dans un premier temps je suis très content de pouvoiir parler à quelqu’un, ca fait déjà 7jours que l’on est repartit de Arrécif. Mais cette joie est immédiatement altéré, Axel m’annonce qu’il arrété, à la cape, à coté de Fanch(159) qui n’a plus de barre suite à de gros soucis sur l’axe principal. Je prend Fanch à la VHF, il paraît à la fois serein et à bout…

De mon coté j’avoue, à ce moment précis je ne sais pas ce que je dois faire, m’arrêter à la cape avec eux…attendre que Fanch puisse faire route? Je réfléchit mais je me dis qu’il y a déjà Axel, ils naviguent ensemble depuis plusieurs jours…Fanch ne dirige plus son bateau pour le moment, mais il flotte et a de l’eau à courir, il est en sécurité. Il me demande clairement de ne pas m’arrêter, je décide alors de continuer, il insiste aussi auprès d’Axel pour qu’il reparte.

Axel repart donc 1 mile derrière moi, nous laissons Fanch dans la nuit noire, nous savons tous les trois que le front arrive. Le vent va donc continuer de forcir en allant vers l’ouest. 2h plus tard j’hésite carrément à faire demi-tour, je me raisonne en me disant que même si je réussissai à retrouver le 159, cela ne servirai sans doute à rien. Nous croisons un gros voilier, je lui raconte les faits avec précision et lui demande de faire suivre à la direction de course par E-mail…

En effet le vent refuse et forcit, nous sommes maintenant au près, il y a 34/35nds établi et les grains sont courts mais violents avec des rafales qui passe les 50nds. Heureusement la mer est formée mais pas trop méchante, à l’avant du front… au lever du jour je suis dans la pétole et la mer croisée, juste derrière le front. Le vent revient rapidement par l’ouest, c’est repartit au près mais en tribord cette fois!

Le vent adonne rapidement et nous sommes au près sur la route dans 12/15ndsde vent. Quel plaisir de naviguer enfin sur le cap à une vitesse correct! Dans la nuit le vent continue d’ adonner et je peux envoyer le gennak… au lever du jour je change déjà le gennak pour le code5… que je garde jusqu’en fin de journée…Axel a envoyé son spi médium avant moi, il me passe sous le vent à peut-être 50m pendant que je fais la manoeuvre, il a la vidéo!! Mais je ne l’ai pas encore récupéré…

J’ai bon espoir que ce nouveau vent se cale au NE, sommes nous enfin dans l’alizée qui se reconstruit progressivement? je l’espère mais le vent reste bien nord et la pression remonte rapidement, nous repassons en conditions anti-cyclonique mais il y a toujours beaucoup d’instabilité, le temps reste orageux.

Je pense que nous sommes enfin en train d’accrocher l’ anticyclone des Bermudes.

 

A suivre…